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Les Terrestres - Trinité

 

Lorsque Mondrian parlait de ses toiles, quadrillage du plan qui invitait l’imagination à l’étendre au-delà de la surface peinte, il définissait les lignes horizontales qui les composaient comme « élément féminin » et les lignes verticales comme « élément masculin ».

 

Depuis le primitif totem, la verticalité a ainsi toujours été masculine, virile, phallique, barrant avec fermeté la ligne d’horizon, l’éternel féminin, toujours renouvelé, à jamais inaccessible.

 

En philosophie, en phénoménologie, l’horizon est un terme fort : pour Husserl, c’est « l’ensemble du monde vécu » qui revêt un « caractère d’horizon ». C’est l'arrière-fond de notre perception des choses et du monde. Aucune chose n'est donc jamais saisie en elle-même et par elle-même, absolument détachée et figée ; chaque chose est vue en rapport avec un « champ » dont elle émerge et s'extrait mais qui ne cesse de l'accompagner et qui permet à son apparaître même de « varier » et de vivre. Lorsqu’on regarde un paysage, on ne voit que des détails sur un fond d’horizon.

 

Béatrice Koster, avec Les terrestres, a voulu inverser une représentation trop commune, transcendantale (patriarcale ?) du totem, en en créant un nouveau, horizontal, allongé, étiré, détendu, calme, embarqué dans un flux où « tout s’écoule » (Héraclite), depuis sa source jusqu’au grand océan.

 

Ces Terrestres, totems féminins donc, s’inscrivent dans un pur champ d’immanence, où la nature et sa simple nécessité font loi : l’air, la terre, le feu et l’eau s’y assemblent tranquillement en un repos qui a moins à voir avec la mort qu’avec la tranquille acceptation du quotidien et de ce qui le constitue.

 

Les Terrestres, en leur voyage immobile, imagent le primitif et incessant retour au monde, qu’elles accueillent en leur sein, comme autant de mères nourricières puissamment symboliques : elles contiennent les forces primitives (les plumes de l’envol et de la spiritualité, la fourrure des pulsions sexuelles, violentes et guerrières, les céréales de la générosité maternelle) dans leur petit espace noosien (une barque, un berceau, une coque, un ventre…).

 

Et elles voguent, esquifs dont la fragilité est aussi la force, presque magiques dans leur réminiscence d’une nature archétypale que la civilisation et la technique semblent avoir oublié.

 

Dans un monde heurté, guerrier, où l’homme s’entretue et détruit son environnement, Les Terrestres sont le rappel d’une femme à l’ordre immuable et permanent du monde tel qu’il est né et sans cesse renait.

 

Wilfried Paris

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